Messe de la nuit de Noël : homélie de Mgr Colomb

26 Déc 2020

1relect. : Is 9, 1-6                          Ps : 95, 1-2a, 2b-3, 11-12a, 12b-13a, 13bc

2elect. : Tite 2, 11-14                  Évangile : Lc 2, 1-14

Le chemin du salut est en Jésus dans notre cœur.

“Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; sur les habitants du pays de l’ombre une lumière a resplendi”  C’est bien à notre monde que s’adresse ce texte. Les ténèbres semblent tomber sur notre terre. L’année 2020 fut porteuse de son lot de guerres, d’attentats, de catastrophes naturelles. La famine menace la vie de millions d’hommes dans une indifférence quasi générale. Les dérèglements climatiques jettent sur les routes des milliers de nos contemporains chaque jour.  Nos propres vies ne furent pas épargnées par les deuils, les maladies. L’angoisse face à l’avenir a été augmentée à cause de la pandémie et des periodes de confinement.

Et voici qu’en cette nuit  se lève une lumière si puissante qu’elle sera capable de dissiper les ténèbres, d’apporter la paix et la stabilité, de faire advenir la joie. Et quelle est cette grande lumière ? C’est un tout petit enfant couché dans le froid d’une étable, réchauffé par la chaleur des animaux et la tendresse de ses parents. Laissons-nous saisir par cet extraordinaire renversement de nos valeurs.

Les héros proposés à l’admiration de nos enfants sont des supers héros, des Batman, des Superman. Vos petits garçons en trouveront peut-être au pied du sapin dans quelques heures ! La panoplie du super héros est complétée par des armes terrifiantes propres à anéantir les obstacles sur la route du pouvoir !

Nous-mêmes, adultes, nous nous laissons séduire par la tentation de la force. Le monde sera-t-il sauvé par la violence ? Non…  Ce débat de notre temps était déjà celui du temps de Jésus. Le messie attendu serait-il un roi tout puissant capable de terrasser les ennemis d’Israël ? Ce messianisme-là n’est pas celui des chrétiens. Ni la force, ni la magie, ne peuvent dissiper les ténèbres. C’est la conversion du cœur des hommes rendus capable de s’ouvrir à l’amour de Dieu qui seule peut ouvrir le chemin du salut.

Le psaume nous rappelle que toute la création perçoit le salut à l’œuvre en notre monde.  La terre et le ciel, tous les peuples et toutes les créatures, la mer et la forêt, exultent de joie.  Un jour enfin l’humanité toute entière aura mis sa confiance dans le Seigneur, et la face du monde s’en trouvera transfigurée.

La venue de Jésus change notre manière d’être : nous pouvons faire le bien.

Dieu s’est fait homme  et “la grâce de Dieu s’est manifestée pour le salut de tous les hommes”, nous dit Paul. Dès lors, notre manière d’être en ce monde s’est trouvée modifiée. Il y a bien un avant et un après l’Incarnation car Dieu “s’est donné pour nous afin de nous racheter de toutes nos fautes, et de nous purifier pour faire de nous son peuple, un peuple ardent à faire le bien”. Faire le bien, voilà ce qui est le signe de l’homme transformé par la grâce de Dieu.  Ce bien dont nous sommes capables, c’est notre part de travail attendue de Dieu pour le salut du monde.

Dieu a besoin de notre conversion libre pour que l’humanité entière entre dans le chemin de la rédemption. Surmontons nos divisions, faisons taire nos haines, travaillons pour un monde plus juste et pacifié, unissons-nous autour de Jésus et rendons témoignage de notre foi dans l’accomplissement des promesses de Dieu “attendant que se réalise la bienheureuse espérance : la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur, Jésus Christ”. Recherchons dans nos vies de quelle manière nous pouvons faire le bien ! Les périodes de confinement ont été l’occasion de témoignages magnifiques de solidarité.

Contemplons la tendresse de l’enfant de la crèche dans sa petitesse et écoutons l’appel divin lancé à l’humanité.

Le prophète Isaïe avait annoncé  une immense lumière capable de déchirer toutes les nuits. La promesse s’accomplit en la personne d’un tout petit enfant couché dans une étable. Dieu est là, dans l’humilité et la vulnérabilité. Dieu n’est ni dans l’ouragan, “qui fend les montagnes et brise les rochers… ni dans le tremblement de terre… ni dans le feu….mais dans  le murmure d’une brise légère”  (1 Rois 19, 11 et s).  Dieu n’est pas un super héros, Dieu n’est pas un magicien. Dieu ne veut pas faire peur aux hommes. Il connaît leur faiblesse et leur péché et il s’approche d’eux avec délicatesse. C’est de nous qu’il attend des signes d’amour, lui qui est l’Amour, c’est de nous qu’il attend des signes de fraternité, de partage, lui qui est l’Ami, c’est de nous qu’il attend des preuves de confiance, lui qui est l’Espérance.

Mais nous, comment accueillons-nous cette tendresse ? Ouvrons-nous nos cœurs pour nous laisser trouver par Dieu ou demeurons-nous enfermés dans la citadelle de nos certitudes, dans la prison de nos peurs, dans le confort de notre médiocrité et de notre péché ?  Permettons-nous à Dieu de nous aimer, nous laissons-nous convertir, transformer, remodeler par cet amour ?

La nuit du monde est profonde et le cri qui la déchire est celui des pauvres, des désespérés, celui de nos frères chrétiens d’Orient qui comme Marie, Joseph et l’enfant Jésus prennent la route de l’exil. L’humanité a besoin de sens. Si nous nous laissons convertir jusqu’au plus intime de nos vies, nous deviendrons les missionnaires de l’Amour, les apôtres de Dieu qui ne cesse de venir visiter ce monde pour le sauver.

Contemplons l’Enfant de la crèche et demandons-lui cette grâce de la conversion. Dès cette nuit répondons à l’appel du pape François “J’invite chaque chrétien, en quelque lieu et situation où il se trouve, à renouveler aujourd’hui même sa rencontre personnelle avec Jésus Christ ou, au moins, à prendre la décision de se laisser rencontrer par lui, de le chercher chaque jour sans cesse. Il n’y a pas de motif pour lequel quelqu’un puisse penser que cette invitation n’est pas pour lui, parce que personne n’est exclu de la joie que nous apporte le Seigneur”  (La joie de l’Evangile n°3).

Et pour nous aider, Marie notre mère est là. “Elle est la petite servante du Père qui tressaille de joie dans la louange. Elle est l’amie toujours attentive pour que le vin ne manque pas dans notre vie. Elle est celle dont le cœur est transpercé par la lance, celle qui comprend toutes les peines. Comme mère de tous, elle est signe d’espérance pour les peuples qui souffrent les douleurs de l’enfantement jusqu’à ce que naisse la justice.

Joyeux Noël, chers frères et sœurs, demeurez dans le cœur de Jésus, contemplez sa tendresse et vous ferez le bien !

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