Loi fin de vie : “Ne dévoyons pas la fraternité !”

11 Mar 2024

Suite aux annonces faites par le Président de la République dimanche 10 mars 2024 à propos de la présentation à l’Assemblée d’un projet de loi pour une « aide à mourir » au mois d’avril, retrouvez quelques réactions sur le site de la Conférence des évêques de France (CEF).

« Ne dévoyons pas la fraternité »

 Déclaration des évêques de France sur le projet de loi sur la fin de vie, le 19 mars 2024

 Evêques de France, rassemblés à Lourdes, lieu de prière et de solidarité avec les personnes les plus fragiles, nous exprimons notre grande inquiétude et nos profondes réserves à l’égard du projet de loi annoncé sur la fin de vie. Nous proclamons sans nous lasser que toute vie humaine mérite d’être inconditionnellement respectée et accompagnée avec une authentique fraternité. Avec beaucoup de nos concitoyens, chrétiens ou non, croyants ou pas, avec un très grand nombre de soignants, dont nous voulons saluer l’engagement, la compétence et la générosité, nous réaffirmons notre attachement à la voie française du refus de la mort provoquée et de priorité donnée aux soins palliatifs.

C’est un impératif d’humanité et de fraternité que de soulager la souffrance et d’offrir à chacun la fin de vie la mieux accompagnée plutôt que de l’interrompre par un geste létal. Notre idéal démocratique, si fragile et si nécessaire, repose sur l’interdit fondateur de donner la mort.

Nous voulons exprimer notre grande proximité à l’égard des personnes en souffrance et nous saluons l’engagement de celles et ceux qui prennent soin d’elles. Nous voulons être à leur écoute et à leurs côtés, soutenant la fidélité des aidants et des proches. Nous sommes impressionnés par les progrès des soins palliatifs. Le Conseil consultatif national d’éthique a fait de leur généralisation la condition éthique préalable à toute évolution législative. Nous sommes convaincus qu’ils peuvent et doivent se développer encore, quantitativement à travers tout notre pays et qualitativement en continuant de répondre de mieux en mieux aux douleurs encore réfractaires. Nous saluons la recherche qui, par solidarité, ne cesse de trouver les meilleurs soins à apporter contre la douleur. Tout cela a un coût qu’une société démocratique comme la nôtre s’honorera d’assumer.

Nous engageons tous les catholiques à s’impliquer davantage auprès des personnes en situation de handicap, âgées ou en fin de vie : la demande de suicide assisté ou d’euthanasie est souvent l’expression d’un sentiment de solitude et d’abandon auquel nous ne pouvons ni ne devons nous résoudre. Plus la solidarité avec les personnes les plus fragiles progressera, plus notre pays avancera sur un chemin renouvelé de fraternité, de justice, d’espérance et de paix.

Notre époque, souvent habitée par la peur de la mort et le désir de prolonger indéfiniment la vie, considère aussi les vies fragilisées comme dénuées de sens. Nous voulons affirmer que toute vie, si fragilisée soit-elle, mérite d’être honorée jusqu’à son terme naturel.

Au milieu de tant de violences contemporaines, dans notre pays et à travers le monde, nous appelons tous les chrétiens comme tous les hommes et femmes de bonne volonté à être d’authentiques serviteurs de la vie de leurs frères et sœurs. Le message de Pâques, que chacun peut accueillir à sa manière, est le triomphe de l’amour et de la vie sur la souffrance et le sentiment d’abandon. Que l’espérance de cette lumière pascale éclaire et encourage tous nos concitoyens et tous leurs représentants au seuil d’un débat décisif pour le présent et pour l’avenir de notre commune humanité.

Pour Mgr Éric de Moulins-Beaufort, archevêque de Reims et Président de la CEF, « appeler “loi de fraternité” un texte qui ouvre le suicide assisté et l’euthanasie est une tromperie ».

"Ce qui est annoncé ne conduit pas notre pays vers plus de vie, mais vers la mort comme solution à la vie."

La Croix : Quelques jours seulement après l’inscription du droit à l’interruption volontaire de grossesse dans la Constitution, ce texte sur la fin de vie touche une nouvelle fois à une question éthique : comment réagissez-vous, êtes-vous inquiet de ces évolutions ?

Mgr Éric de Moulins-Beaufort : Notre pays devrait être, depuis la loi Claeys-Leonetti, un pays en pointe sur les soins palliatifs. Or, dans son entretien à La Croix, le président de la République présente un texte tout ficelé sur ce qu’il appelle « l’aide à mourir » mais, sur les soins palliatifs, de vagues promesses avec un chiffrage tout à fait approximatif. C’est l’équilibre exactement inverse de ce que Mme Vautrin m’avait décrit mercredi matin.

Ce qui est annoncé ne conduit pas notre pays vers plus de vie, mais vers la mort comme solution à la vie. Je l’ai dit comme beaucoup d’autres et je le redis : les Français n’envisageraient pas de la même manière la fin de vie si les soins palliatifs étaient chez nous une réalité pour tous partout, comme le voulait la loi dès 1999. Ces derniers temps, non seulement rien n’a été fait pour apporter des soins palliatifs là où il n’y en a pas, mais les moyens de plusieurs services existants ont été réduits encore. C’est cela la vérité.

Vous avez rencontré le président de la République à plusieurs reprises, notamment sur ce sujet de la fin de vie : retrouvez-vous dans ce texte ce que vous avez pu lui dire ?

Mgr É. M.-B. : Le président a annoncé depuis longtemps ne pas vouloir brusquer les esprits sur les sujets sociétaux. Il a reçu beaucoup de personnes, y compris les responsables de culte, c’est indéniable. Mais il est habile aussi. Il parvient à reprendre et à approprier au texte annoncé notre grand point d’insistance qui est la fraternité. Appeler « loi de fraternité » un texte qui ouvre à la fois le suicide assisté et l’euthanasie est une tromperie.

Pour Mgr Matthieu Rougé, évêque de Nanterre, « on ne peut pas parler de fraternité quand on répond à la souffrance par la mort ».

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