Homélie de la fête de l’Épiphanie

8 Jan 2018

Homélie donnée par Mgr Colomb pour la fête de l’Epiphanie en la cathédrale de La Rochelle.

 

Savoir voir au-delà du temps!

Le mot Épiphanie désigne la manifestation de Dieu aux hommes en la personne de Jésus-Christ. L’Epiphanie c’est aussi le rappel de la dimension universelle du salut qui n’est pas réservé au seul peuple hébreu.

Isaïe nous parle d’un temps difficile.  Dieu a fait revenir son peuple de l’exil et tout ne se passe pas comme prévu. Les générations sont passées, les peuples se sont mélangés, les traditions ont été oubliées… N’y a-t-il pas quelques ressemblances avec note situation aujourd’hui ?…. Et pourtant le prophète sait voir au-delà du temps. Au milieu des épreuves il perçoit  “la gloire du Seigneur” qui s’est levée sur Jérusalem. Nous sommes invités à faire de même en traversant les épreuves qui sont les nôtres. Toutes les nations tournent leurs regards vers la ville sainte car c’est là que se lève la clarté de l’aurore.  Une multitude se pressera « d’au-delà des mers ». Ils apporteront avec eux des trésors, de grandes richesses, l’or et l’encens, et  “ils annonceront les exploits du Seigneur.” Cette vision d’un avenir de paix et de prospérité est fondée sur la foi inébranlable en l’accomplissement des promesses de Dieu.

C’est un roi puissant, juste et pacifique qui inaugurera les temps bénis promis par le prophète.   Quand un nouveau roi était sacré, comme aujourd’hui quand un nouveau chef d’état arrive au pouvoir, les espoirs sont grands de voir s’inaugurer un temps de paix, de justice, de prospérité. On attend du roi  qu’il délivre”le pauvre qui appelle et le malheureux sans recours”. Ce roi aura le “souci du faible et du pauvre, du pauvre dont il sauve la vie”, nous rappelle le psalmiste. Le salut en Jésus-Christ est pour toutes les nations, pour toutes les cultures ! Quels cadeaux apportons-nous à Jésus ? L’or et l’encens offert, qu’est-ce que c’est pour nous aujourd’hui ? Le temps que nous consacrons aux autres, l’amour que nous donnons, la solidarité que nous manifestions !
Cette attente des temps bénis est-elle utopique? Le peuple hébreu se laissait-il berner par une illusion ? Non. L’homme de foi est héritier de la promesse. Il sait que l’histoire humaine, notre histoire, a un sens c’est-à-dire à la fois une direction et une signification. Dieu l’a promis, il donnera à un roi ses pouvoirs, “à ce fils de roi sa justice.” Ce roi, c’est le messie, le fils de Dieu venu faire sa demeure parmi les hommes. C’est en Jésus que toutes les nations sont invitées à reconnaître le roi de justice, celui qui seul associe en lui puissance et humilité, gloire et miséricorde, justice et charité, paix et prospérité pour tous.

Héritiers de la promesse qui a conduit les mages d’orient à Bethléem, prenons le chemin de l’adoration !

Car Paul le réaffirme avec force : “toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps,  au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Évangile.”
” Ce mystère n’avait pas été porté à la connaissance des hommes des générations passées ” Mais Dieu n’entend pas nous le cacher. «Il a été révélé maintenant à ses saints Apôtres et aux prophètes dans l’Esprit». La volonté de Dieu est que,  en Jésus-Christ, la création toute entière soit réconciliée. Quand nous dirons le Notre Père tout à l’heure nous demanderons “Que ta volonté soit faite”. La volonté du Père c’est la réconciliation de tous en Jésus-Christ.
Alors que dans la nuit de Noël les bergers cherchaient un Sauveur, voici des mages qui veulent se prosterner devant un roi. Comme nous, ils cherchent, ils questionnent, ils explorent. Cherchant le roi des juifs « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son étoile à l’orient et nous sommes venus nous prosterner devant lui », c’est naturellement qu’ils vont à Jérusalem pour se renseigner. Sans doute n’avaient ils jamais entendu parler de la petite bourgade de Bethléem. Prenons le chemin de l’adoration, nous  rappellerons au monde que seul Dieu est adorable, et non l’homme, le tyran qui pourtant cherche à se faire adorer, nous mettrons l’homme à sa juste place, Dieu à la première place !

Nous, chrétiens avons mission d’être le ciel étoilé qui conduit à Jésus !

Quelle étoile suivons-nous ? Où porte notre regard ? Vers le bas ou vers le haut ? A quoi aspirons-nous ? Voulons-nous nous contenter de revenus financiers corrects, de loisirs, d’une petite ville tranquille ? Les mages se mettent en route ! Ils suivent l’étoile qui les conduit jusqu’à Jésus. Ils nous invitent à nous mettre en route à suivre l’étoile du Christ !
Ils interrogent « Où est le roi des Juifs ? » : nous devons être dans ce monde, auprès de nos amis, de nos voisins, ceux qui répondent aux questions : Où est Jésus, qui est Jésus, qui êtes-vous, vous frères et sœurs chrétiens ? Pourquoi vous réunissez-vous pour prier, pour célébrer l’eucharistie ? Alors si nous donnons à nos contemporains la curiosité de Dieu, nous aurons atteint notre mission. C’est l’un des aspects de la sortie missionnaire à laquelle nous invite le pape François (La joie de l’évangile n° 20). Est-ce que notre vie, nos choix posent question ?…
 C’est par des païens qu’Hérode a appris la naissance de Jésus et il en fut bouleversé car il craignait la fin de son règne. Pendant qu’il préparait un plan machiavélique pour faire périr l’enfant, les mages poursuivirent leur route sereinement.  Ils trouvèrent l’enfant et sa mère “et, tombant à ses pieds, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe”.
Etre confrontés à l’hostilité du monde, ou même à son indifférence, ne doit pas nous détourner de notre route.  Notre mission reçue au baptême, c’est de connaître et reconnaître en l’enfant de la crèche, dans l’homme cloué sur le bois de la croix, notre sauveur et le sauveur du monde. Sans cesse nous sommes envoyés pour l’annoncer à nos frères. Quand les mages “avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode” rentrent chez eux “par un autre chemin”, n’en doutons pas, ce détournement aura été pour eux l’occasion de faire connaître dans les pays traversés la gloire de Dieu venu en notre humanité pour nous sauver. L’adoration de l’Enfant Jésus, l’adoration du Seigneur présent dans le Saint Sacrement nous fait prendre, comme aux mages, un autre chemin, le chemin de la vérité !
Un père carme, le Père Jean Lévêque écrit qu’il faut courageusement et sereinement prendre le parti pris de Dieu qui est de faire :

  • de la richesse avec de la pauvreté
  • de l’éternel avec du quotidien
  • de l’universel avec du limité
  • de la rédemption avec de l’ordinaire
  • du divin dans l’humanité

Ce sont les vœux que je formule, chers frères et sœurs pour chacun d’entre nous, en ce premier dimanche de l’année !
+ Georges Colomb
Évêque de La Rochelle et Saintes

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