Chère Madame Ouzeau,
La décoration que vous recevez aujourd’hui force à la fois l’admiration et la reconnaissance pour votre action en faveur des personnes sourdes et malentendantes. Institué par le général De Gaulle, l’Ordre national du mérite récompense les services distingués rendus à la nation française. Elle fait partie des décorations les plus importantes que l’on puisse recevoir dans notre pays. Parmi les grades de l’Ordre National du Mérite, se trouve celui de chevalier, que vous devenez aujourd’hui.
La médaille que je vous remets au nom du président de la République est la reconnaissance d’une vie donnée consacrée à nos frères sourds. Vous êtes un exemple pour la jeunesse.
Depuis votre plus tendre enfance, chère madame Ouzeau, vous avez côtoyé, entouré, soutenu, servi et aimé les sourds. Vos propres parents étaient sourds et muets lorsque vous êtes née dans leur foyer. L’amour de vos parents leur a donné deux enfants : deux filles qui ont appris à parler avec les enfants du voisinage.
Rapidement, vous devenez une interprète pour les personnes sourdes et malentendantes, à commencer par vos parents. Vous les aidez dans leurs démarches administratives, dans leur vie courante. Vous devenez en quelque sorte la traductrice de leurs projets. Toute votre vie suit cette trame. De fil en aiguille, vous devenez l’interprète de bon nombre de personnes malentendantes, ici dans votre département d’origine.
Vous n’avez pas eu peur de vous engager. Votre détermination vous conduit à devenir en 1982 la première femme en France à devenir pompier volontaire. Cette particularité n’est qu’une illustration parmi d’autres de votre dévouement. L’action auprès des plus faibles vous anime profondément et la présence d’une femme comme vous dans notre société est non seulement précieuse pour les sourds mais aussi pour chacun d’entre nous : car votre exemple est un aiguillon qui nous encourage, nous aussi, à nous mettre au service des plus faibles.
Finalement, en 2008, vous créez votre propre association. Votre intuition est d’aider les sourds à régler les problèmes qu’ils peuvent rencontrer dans leur vie quotidienne afin de les mettre à égalité avec tout le monde. A côté de cet engagement, vous vous rendez dans différentes structures pour diffuser la langue des signes, cette langue gestuelle produite par les mains, les expressions du visage et le corps qui permet aux personnes sourdes de communiquer.
Que la décoration qui vous est remise aujourd’hui vous encourage à poursuivre votre mission ici-bas auprès de nos frères sourds. Et sachez, chère madame, qu’en mettant votre confiance dans le Seigneur, comme vous l’avez toujours fait, vous aurez la plus grande récompense que l’on puisse recevoir. Plus importante que les rubans de couleur, plus remarquable que les honneurs que l’on connaît sur terre, plus considérable que tous les trophées temporels : la confiance que l’on met dans le Seigneur fait de nous des invités aux noces éternelles.
Le Seigneur fait entendre les sourds et parler les muets. Par une simple parole (« Effata », ce qui signifie « Ouvre-toi »), en touchant nos oreilles et notre langue, le Christ ouvre nos oreilles et délie nos langues. Puissions-nous avoir une confiance toute renouvelée en Dieu, qu’il nous accorde la grâce de le contempler et qu’il nous guérisse de nos mutismes et de nos surdités intérieures.
Madame Ouzeau,
Au nom du président de la République, en vertu des pouvoirs qui nous sont conférés, nous vous faisons chevalier dans l’Ordre National du Mérite.
Mgr Georges Colomb
Evêque de La Rochelle et Saintes
Directeur National des Œuvres Pontificales Missionnaires