A l’occasion de sa visite pastorale du doyenné de Haute-Saintonge, Mgr Colomb a délivré un message aux enseignants jeudi 14 décembre 2017.
Former les adultes de demain
L’enseignant exerce un métier passionnant, celui de participer à la construction de la société en transmettant son savoir, celui de former les adultes de demain.
Cette formation s’inscrit aujourd’hui dans un monde en perpétuelle mutation, dans un monde de brassages socioculturels et religieux, dans un monde où le numérique occupe une place sans cesse grandissante jusqu’à devenir lui-même un concurrent des systèmes éducatifs traditionnels.
C’est dans ce monde-là que l’école s’efforce de donner aux jeunes les outils qui les rendront capables d’entrer dans la vie professionnelle, de prendre leurs places de citoyens, de se conduire en adultes responsables et solidaires.
Ce n’est pas seulement l’assimilation de contenus qui permettra la formation des adultes de demain. Former des jeunes, c’est aussi leur transmettre le goût de la vie, de la rencontre de l’autre, de l’amélioration de soi et de l’engagement pour le bien commun. C’est encore leur donner l’occasion d’ouvrir leur cœur et leur intelligence à la beauté de la création.
A l’heure où le “classement Pisa” mesure les performances des systèmes éducatifs des différents pays, il est important de se souvenir qu’une place doit être donnée aux plus fragiles. Former les adultes de demain, c’est aussi porter témoignage d’une vie solidaire et fraternelle.
Au cœur du projet éducatif de l’enseignement catholique,c’est toujours la personne de Jésus Christ qui est honorée. Dieu, en épousant notre condition humaine, nous donne des frères à aimer, une création à respecter, une bonne nouvelle à annoncer.
Cette Bonne nouvelle est aussi de nature à préserver les jeunes générations du découragement. Elle les pousse à s’engager pour transformer ce monde qui, pour beaucoup d’entre eux, peut apparaitre porteur de lourdes menaces – terrorisme, chômage, précarité…
L’école n’est plus aujourd’hui le seul lieu de transmission des savoirs. Tout comme la famille, elle entre désormais en concurrence avec de nouvelles possibilités d’apprentissage plus informelles et ludiques, notamment les nouveaux médias sociaux. Internet, Facebook, Instagram…autant de nouveaux moyens de partager les connaissances, pour le meilleur comme pour le pire. Autant d’occasion d’éduquer au discernement, à l’esprit critique, à l’usage raisonné….
Mais l’école reste le seul lieu apte, avec la famille, à proposer une éducation intégrale qui va au-delà de la transmission brute des savoirs.
Ce qui marquera le jeune en formation, au-delà des savoirs transmis dont l’importance n’est pas à démonter, c’est d’avoir rencontré des hommes et des femmes qui auront su créer des communautés éducatives solidaires et fraternelles, respectueuses des personnes, attentives au développement de tous au plan intellectuel mais aussi affectif, social, éthique et spirituel. Des communautés éducatives qui sachent manifester leur espérance, leur joie, leur confiance en l’avenir de chaque élève. Des communautés éducatives accueillantes, ouvertes au dialogue, soucieuses du service du bien commun et capables d’accompagner l’éveil à la foi à tous les âges de la vie.
Ainsi la formation scolaire n’apparaîtra plus comme une contrainte, une obligation, voir pour certains une punition, mais comme l’opportunité de se découvrir, de découvrir l’autre et le monde, de découvrir aussi le Tout Autre, avec passion.
L’éducation se fonde sur une anthropologie qui intègre la mémoire de notre histoire et la mémoire des promesses qui fondent notre foi. Cette anthropologie situe l’homme au cœur de la création pour le rendre responsable de l’avenir de notre planète, de la paix à construire, du regard de foi et d’espérance dont notre monde a soif.
Celles et ceux qui sont au service de ces communautés éducatives marqueront à jamais les jeunes en formation. Ils seront les modèles à imiter, des références pour toute une vie.
CONCLUSION
Former les jeunes de demain se résume trop souvent à mesurer les résultats quantifiables d’un apprentissage. Les familles sont très sensibles au classement des lieux d’apprentissage afin d’offrir les meilleures opportunités à leurs enfants. Ceci ne doit pas faire perdre de vue le fait que la formation d’une personne demande de longues années, l’intervention de partenariats multiples (école, famille, associations sportives et culturelles, aumôneries, scoutisme….)
L’enseignement ne se limite pas à la transmission de connaissances. Il guide vers la découverte des talents que nous avons tous reçus, vers la recherche de la vérité, de la beauté, de la justice et du bien commun.
” Ne vous découragez pas face aux difficultés que le défi de l’éducation présente !” disait le pape François dans son discours aux élèves et professeurs des écoles gérées par des Jésuites en Italie et en Albanie (7 juin 2013). Il poursuivait: “Éduquer n’est pas un métier, mais une attitude, une façon d’être ; pour éduquer, il faut sortir de soi et être au milieu des jeunes, les accompagner dans les étapes de leur croissance en se mettant à leurs côtés. Donnez-leur une espérance, un optimisme pour leur chemin dans le monde. Enseignez à voir la beauté et la bonté de la création et de l’homme, qui conserve toujours la marque du Créateur. Mais surtout, soyez témoins à travers votre vie de ce que vous communiquez. Un éducateur […] transmet des connaissances, des valeurs à travers ses paroles, mais il aura une influence sur les jeunes s’il accompagne ses paroles de son témoignage, à travers sa cohérence de vie. Sans cohérence, il est impossible d’éduquer !”
Et pour finir sur une note plus légère, voici ce qu’aimait à dire John Lennon, le fondateur des Beatles, sur l’école : “Quand je suis allé à l’école, ils m’ont demandé ce que je voulais être quand je serai grand. J’ai répondu : ” Heureux ” Ils m’ont dit que je n’avais pas compris la question, j’ai répondu qu’ils n’avaient pas compris la vie!”.
Chers amis, à ces jeunes dont les parents ont confiance en vous, transmettez le message du bonheur contenu dans l’évangile, le message des béatitudes, un bonheur responsable, un bonheur solidaire, un bonheur à la suite du Christ et avec lui. Vous l’avez compris, votre mission d’éducateur, c’est de transmettre beaucoup plus que des valeurs, même si cette valeur est sûre. C’est le Christ qu’il faut faire rencontrer aux jeunes !
+ Georges Colomb
Évêque de La Rochelle et Saintes