Homélie donnée par Mgr Colomb pour l'ordination presbytérale de Joseph-Marie Vo Ta Sam et Eric Ndikubwayo

22 Juin 2020

Ordinations presbytérales de Joseph-Marie Vo Ta Sam et Eric Ndikubwayo

Isaïe 61, 9-11 – Psaume – Actes 10 , 34-38  Luc 2, 41-51

Chers amis, cela fait plusieurs années que vous êtes en France. A Rochefort, vous avez pu découvrir une partie du diocèse, prendre des initiatives pastorales et être accompagnés par le Père Le Nézet et le Père Bigot. La vie fraternelle au presbytère vous a montré le vrai visage du prêtre diocésain que vous allez devenir, un homme de prière, un homme d’action, un frère parmi ses confrères.

Aujourd’hui est un jour de joie pour l’Eglise. Le Seigneur vous appelle, Joseph-Marie et Éric, pour annoncer son évangile, pour célébrer l’eucharistie et manifester aux hommes son amour. Vous avez entendu cette phrase de Jésus “C’est chez mon Père que je dois être”, vous l’avez laissée mûrir en vous pour porter du fruit. Aller vers le Père, voilà ce que vous avez fait, quittant vos pays, vos familles, vous extrayant de votre quotidien pour vous laisser saisir par l’inattendu de Dieu.  Dieu vous a murmuré “suis-moi” et, petit à petit, vous avez accueilli cet appel dans votre liberté d’hommes jusqu’à vous laisser guider vers cette terre de Charente-Maritime.

Cet appel, l’Eglise l’a authentifié. Aujourd’hui, vous voilà prêts à faire le don de vous-mêmes au Seigneur. Votre “oui” fera de vous, pour l’éternité, des prêtres au service de l’Eglise et des hommes. “Le prêtre n’est pas prêtre pour lui, il l’est pour vous”, disait le saint curé d’Ars aux villageois. C’est à son peuple rassemblé en Eglise que le Seigneur se donne sous le double signe du pain et du Verbe. Le prêtre, en recevant le sacrement de l’ordre, est configuré de manière irrévocable et éternelle au Christ prêtre éternel. Il reçoit pour mission de rassembler le peuple de Dieu, de le guider et de le nourrir.

Vous le savez bien, une  grande partie du peuple de Dieu, la majorité des Baptisés est absente de nos rassemblements dominicaux. Nous ne rencontrons pas assez nos frères qui ne connaissent pas le Christ, or le récit des Actes des Apôtres nous l’a rappelé « celui qui pratique la justice est agréable à Dieu ».

Votre mission de rassembleur passe d’abord par l’annonce et le dialogue dans ces aréopages, ces périphéries chères au Pape François. Soyez les témoins de la Miséricorde de Dieu à l’œuvre dans vos vies et vous porterez toujours le souci des humbles, des pauvres car Jésus a dit “je te bénis, Père : ce que tu as caché aux sages et aux savants, c’est aux petits que tu l’as révélé” (Mt 11,25).

Entièrement orientés vers le Christ et son Royaume, vous pourrez compter sur un guide sûr, une mère aimante, un modèle d’humilité, la Vierge Marie. Recevez la chez vous, c’est-à-dire au plus profond de votre être, comme le recommandait le pape Benoît XVI à tous les prêtres (audience générale du 12 août 2009). Le Seigneur qui vous appelle aujourd’hui marchera toujours à vos côtés.      

Configuré au Christ

Le prêtre est appelé à poser des actes qui dépassent les limites de sa propre nature. Configuré au Christ, visité par l’Esprit Saint, il lui appartient d’enseigner, en communion avec l’évêque, et de sanctifier le peuple dont il a la charge.   A Pierre qui confesse “Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant !” Jésus répond: “Heureux es-tu, Simon fils de Yonas : ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux.” (Mt 16,16-17). C’est sous la mouvance de ce même esprit saint reçu lors de l’ordination que le prêtre est instauré médiateur entre Dieu et les hommes, non pas pour sa propre gloire, ni par volonté de puissance, mais comme serviteur.

Le pape François compare la situation du prêtre à celle de Moïse, il déclare : « il s’est approché du feu et a laissé les flammes brûler ses ambitions de carrière et de pouvoir » pour se livrer tout entier à l’Amour exclusif de Dieu dans une vie de disponibilité (itinérance missionnaire, mobilité, porte et église ouverte, liturgie des heures…)  dont le célibat est le signe. (Discours du pape François à l’ouverture de l’assemblée des évêques italiens 16 mai 2016).

Sorti du peuple de Dieu, c’est vers ce peuple de Dieu que vous êtes envoyés,  pour rendre Jésus présent par la vie sacramentelle, dans le pardon, et par-dessus tout dans la célébration de l’Eucharistie, nourriture des hommes de ce temps et anticipation du banquet des noces de l’Agneau. Cette période de confinement, dont nous sortons petit à petit, nous a montré combien l’eucharistie est importante pour nourrir la foi de nos frères et sœurs. Nous avons aussi mesuré les confusions qui peuvent exister dans l’esprit des baptisés sur ce sacrement, source et sommet de la vie chrétienne. Il vous appartiendra d’enseigner au peuple chrétien ce qu’est le mystère de l’eucharistie.

Vous amènerez Dieu aux hommes et vous conduirez les hommes à Dieu, en lui présentant toutes leurs peines, leurs joies, leur espérance. A l’imitation de Jésus, vous offrirez  au Père cette prière : “Moi, je prie pour eux ; ce n’est pas pour le monde que je prie, mais pour ceux que tu m’as donnés, car ils sont à toi” (Jn 17,9). La tâche est immense, la mission est grande ! On cite souvent, à l’occasion des ordinations, cette phrase si juste du saint curé d’Ars : ” Oh ! Que le prêtre est quelque chose de grand !” et l’homme est si petit ! Rappelez-vous de cette invitation à grandir chaque jour dans la vie spirituelle.

N’ayez pas peur ! Dieu ne vous abandonnera jamais. Quand la vie vous paraîtra lourde, difficile, ingrate, souvenez-vous de Moïse. Il a tout quitté sur une parole de Dieu, comme vous aujourd’hui. C’est un peuple ingrat, infidèle, à la nuque raide, jamais rassasié qui lui est confié, “un fardeau”. Voyant la détresse de Moïse, sa fatigue, Dieu intervient : “Rassemble-moi soixante-dix hommes parmi les anciens d’Israël, connus par toi comme des anciens et des scribes du peuple. Tu les amèneras à la tente de la Rencontre, où ils se présenteront avec toi. Là, je descendrai pour te parler, et je prendrai une part de l’esprit qui est sur toi pour le mettre sur eux. Ainsi ils porteront avec toi le fardeau de ce peuple, et tu ne seras plus seul à le porter.” (Nb 11,16-17).

Aujourd’hui vous allez affronter l’indifférence, parfois même l’hostilité. Vous aurez la charge de la communion entre des hommes prompts à la querelle et à la division. Sachez-le, car nous en sommes témoins,  Dieu ne vous abandonnera pas ! Il vous donne des frères, des confrères, pour porter avec vous la charge du labeur. Il vous donne aussi, dans la communion des saints, le soutien et la prière de tous ceux qui vous ont précédés dans le sacerdoce sur cette terre de Charente-Maritime. Le Bienheureux Souzy et ses compagnons martyrs de la Révolution française. Les martyrs du Vietnam, ceux de l’Afrique intercèdent pour vous. Sous toutes les latitudes où l’évangile est annoncé, l’Eglise dérange, car elle ne suit pas les modes et ne flatte pas l’opinion publique (Les prêtres n’appartiennent pas à des sociétés secrètes influentes), l’Eglise est au service de la vérité, et la vérité c’est le Christ.

Restez des hommes libres, la vie communautaire peut conduire au panurgisme, la société civile qui, hélas, déteint sur l’Eglise peut vous pousser à la démagogie pour plaire à ceux qui parlent fort mais ne sont pas l’expression du sensus fidei des baptisés. Restez vous-même, soyez fidèle à votre vocation. Dieu qui voit dans le secret des coeurs fera de vous des hommes heureux, des hommes en paix.

Avec la Vierge Marie, Dieu vous donne une mère.

Devenant mère du Christ, la Vierge Marie est devenue mère du souverain prêtre, mère du Fils tout entier donné à l’œuvre du Père : “Tu n’as voulu ni sacrifice ni offrande, mais tu m’as formé un corps. Tu n’as pas agréé les holocaustes ni les sacrifices pour le péché ; lors, j’ai dit : Me voici, je suis venu, mon Dieu, pour faire ta volonté” (He 10,5-7). Donnant un corps de chair au Fils unique, Marie a aussi était présente à chaque étape de sa vie d’homme gardant dans son cœur tous les événements.

Toute transparente à la volonté de Dieu comme aucune créature n’a pu l’être avant elle, par son humilité, par sa disponibilité à l’action de l’esprit saint, Marie a été la première à entrer dans le mystère insondable du don que Dieu fait aux hommes dans la personne de Jésus. Qui mieux qu’elle, “vêtue des vêtements du salut… couverte du manteau de la justice”, providentiellement préservée de la faute originelle, peut guider le prêtre sur le chemin de l’intelligence des mystères de Dieu ?  

Quand Jésus livre son ultime combat, donnant sa vie sur le bois de la croix, prêtre et victime,  elle est donnée pour mère au disciple bien aimé “Femme, voici ton fils”. Le disciple bien aimé, celui qui écoutait le cœur de Jésus au moment du dernier repas, c’est vous aujourd’hui cher Éric, cher Joseph-Marie. Le Seigneur qui vous a déjà comblés de sa grâce vous fait un ultime cadeau en ce jour de votre ordination. Il vous donne Marie pour mère. Prenez la chez vous, prenez la avec vous. Elle vous gardera sur le chemin de l’humilité, elle fera de vous des hommes à l’écoute de leurs frères et sœurs, du Seigneur Jésus, elle vous conduira toujours vers les croix de ce monde, celles qui ne font pas de bruit. Confiez-lui vos peines et vos joies. Elle veillera à vous garder sur le chemin du salut, pour vous-mêmes et pour le service de l’Eglise et des hommes.  

Bonne mission en Charente Maritime, chers amis !

+ Georges Colomb

Évêque de La Rochelle et Saintes

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