Extraits de l'homélie donnée par Mgr Colomb à la Cathédrale et à l'église Saint-Sauveur de La Rochelle, dimanche 2 juillet 2017

3 Juil 2017

 Extraits de l’homélie donnée à la cathédrale et à St-Sauveur, dimanche 2 juillet 2017

 

Toute relation humaine est une visitation !

L’Alliance entre le prophète Elisée et la femme de Sunam est l’image de l’Alliance entre Dieu et Israël. Si nous lisions tout le récit dans le livre des Rois, nous découvririons cinq points : la fidélité de Dieu, la sollicitude de Dieu pour son peuple, le désir de Dieu d’habiter au milieu de son peuple, sa promesse de lui donner une terre, sa promesse de donner la vie.  A l’hospitalité, offerte à Élisée par la Sunamite, correspond l’enseignement de Jésus sur l’accueil, enseignement qui achève le discours apostolique du chapitre 10 de saint Matthieu que nous lisons aujourd’hui.
Jésus y insiste pour montrer la relation qui s’établit avec lui-même et avec son Père lorsqu’on accueille un frère en tant que “disciple, prophète, juste”. Accueillir l’autre, c’est accueillir Dieu (cf Genèse 18, Abraham et Sara). Ce qui signifie que toute relation humaine a une dimension divine. (Matthieu 10.40). Toute relation humaine est visitation !
Accueillir Dieu, c’est le recevoir en reconnaissant l’initiative de son amour pour nous. Ce n’est pas une théorie, c’est une expérience. Il faut savoir se reconnaître pauvre et humble au point de ne pouvoir vivre que par Lui. C’est Lui offrir notre faiblesse, nos limites qui conduisent à la mort, pour qu’il manifeste en nous sa puissance de résurrection. La relation à Dieu passe par la médiation de nos relations humaines. Nul ne peut prétendre aimer Dieu si l’on n’aime pas ses frères, son frère, même ennemi. Quel est celui d’entre nous qui ne doit pas ses plus belles rencontres, la rencontre de sa vie, sa vocation, à une médiation humaine ? L’amour de Dieu et l’amour des autres ne sont qu’un seul et même amour. Cette  réflexion nous aide à comprendre l’importance de l’accueil de nos frères. La démarche spirituelle rejoint la démarche humaine. Prétendre aimer Dieu sans aimer les siens, c’est-à-dire, sans aimer nos frères, est un mensonge !
Jésus emploie plusieurs fois le verbe « accueillir ». C’est dire l’importance qu’il donne à l’accueil. Pour faire preuve d’une totale disponibilité il est nécessaire de vivre un détachement dans ses relations (familiales notamment), vient-il de dire. Tout au long des Évangiles il s’est montré accueillant et bienveillant envers tous et en particulier les malades, les pauvres, les étrangers, les pécheurs. Ils étaient mal accueillis, voire rejetés par les responsables religieux, parce qu’ils n’observaient pas toutes les prescriptions de la loi. Saint Paul écrira aussi : « Soyez accueillants les uns pour les autres comme le Christ vous a accueillis pour la gloire de Dieu ». Notre Eglise doit toujours s’interroger sur la façon  d’accueillir des gens dans tous les domaines. L’accueil est le  premier lieu, la première étape de  l’évangélisation !

La conversion est un changement radical de vie !

Jésus continue de donner des conseils aux douze Apôtres. Des conseils parfois sévères, parfois réconfortants. Comme les prophètes ou les psaumes dans la Bible, Jésus s’exprime parfois de manière assez dure !
Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi ;
celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi ;
celui qui ne prend pas sa croix et ne me suit pas n’est pas digne de moi.
Qui a trouvé sa vie la perdra ; qui a perdu sa vie à cause de moi la gardera.
Qui parmi nous est capable de suivre le Christ quand il parle ainsi, et si on prend ses paroles au pied de la lettre ? Marcher à sa suite, est-ce un choix radical qui passe avant tout le reste et presque à l’exclusion d’autres personnes que lui ? Ne serait-on pas alors mauvais disciple, puisque son commandement demande sans cesse d’aimer les autres par amour de lui, et d’honorer ses parents ? Comment saisir cette contradiction ? Il est vrai que le choix de suivre le Christ et de prendre sa croix comme lui, peut s’avérer déchirant pour ses disciples surtout dans un contexte de persécution. On comprend mieux le passage d’Évangile de ce dimanche si on lit les trois versets qui le précèdent et si on se rappelle le contexte des premiers temps de l’Église. « Je ne suis pas venu apporter la paix sur la terre, mais le glaive. Car je suis venu opposer l’homme à son père, la fille à sa mère et la bru à sa belle-mère : on aura pour ennemis les gens de sa famille. »
Lorsque Matthieu écrivait son Évangile à la fin du 1er siècle, le choix de suivre le Christ et d’être baptisé pouvait entraîner pour les chrétiens des choix déchirants et des ruptures douloureuses avec leur famille, leur entourage, la religion de leur milieu social. Leurs manières de considérer Dieu et de vivre des valeurs humaines devenaient différentes de celles de leur culture juive ou païenne. Ils pouvaient être amenés à s’opposer à leurs parents, en ce qui concernait le culte, et aussi les rapports humains, notamment la dignité de tous, le respect des plus petits, les rapports homme-femme, maître-esclave, parents-enfants, (conception du mariage chrétien et du mariage selon le droit romain), etc.
Aujourd’hui encore, surtout dans les pays musulmans et dans certains pays d’Asie, par exemple, toute conversion religieuse est interdite. Beaucoup de ceux et celles qui deviennent chrétiens doivent remettre en cause des aspects de leur propre culture, et partagent en quelque sorte le destin du Christ, parfois jusqu’à la mort. Le baptême chrétien pour eux n’est plus une formalité, mais un choix éprouvant. J’étais à Tunis il y a deux mois…. En Europe, le respect des différences, des croyances, en bref la tolérance mutuelle, est une réalité d’ailleurs très liée à l’indifférence religieuse. Mais chez nous, des gens, des jeunes par exemple, au nom de leur foi sont rejetés, harcelés pour diverses raisons. Et combien sont rejetés et considérés comme ringards parce que ils sont chrétiens !

La vie nouvelle en Christ : c’est la vie dans l’intimité avec lui.

Cet évangile peut choquer si il n’est pas bien situé dans son contexte. Est-ce que Jésus viendrait condamner les liens familiaux, l’amour des enfants pour ses parents, l’amour des parents pour leurs enfants ?
Notons bien que Jésus s’adresse aux Douze avant de les envoyer en mission. C’est donc à ces missionnaires que Jésus s’adresse lorsqu’il dit : « Qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi. » Ce qui est donc dénoncé par Jésus, c’est un amour qui deviendrait carcan, qui renfermerait chacun sur son horizon immédiat et qui rendrait aveugle sur les besoins de l’humanité et la nécessité de faire entendre à tous l’Évangile.
Ceux qui ont compris ce message, ce sont les missionnaires partis aux quatre coins du monde, le Père Thibault ici présent, missionnaire à Cuba, les religieux contemplatifs ou les coopérants partis passer deux ou trois ans de leur jeunesse en Asie avec les Missions Etrangères de Paris, ou sur d’autres continents ou pays, comme le font certains étudiants de notre diocèse en Roumanie en ce moment.
Suivre Jésus n’est pas sans contrepartie. En perdant sa vie pour le Christ, le disciple se voit identifié à lui : « Qui vous accueille, m’accueille ! ». Il entre dans l’intimité de la vie divine. Il donne sa vie et fait l’expérience de la vraie liberté. La croix est une libération en ce sens qu’elle est le plus haut degré de l’amour et de la vérité. Elle est victoire sur le péché. Saint-Paul dans la lettre aux Romains parle à juste titre de vie nouvelle par le baptême qui nous unit à la mort du Christ, c’est-à-dire la mort au péché ! La vie nouvelle en Christ est forcément une vie missionnaire, une vie contemplative qui nous invite à partager avec nos frères le trésor de la foi que nous avons reçu, la connaissance de l’amour de Dieu pour nous en Jésus-Christ. En ce début de temps de vacances, prenons le temps de la contemplation pour devenir à la rentrée les acteurs de la mission, les visiteurs qui porteront le Christ à leurs amis. Bon été, chers frères et sœurs !
+ Georges  Colomb
 
 
 
 
 
 
 
 
 

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