Homélie du 3ème dimanche ordinaire 2023 (Dominique SERRE diacre à Oléron)

Elisabeth, mon épouse, a coutume de dire que j’aime à couper les cheveux en quatre.

Et pourtant comment faire autrement lorsque même que la présentation des textes bibliques nous provoque à souligner des ambiguïtés. Ainsi la première lecture nous dit que, d’après le prophète Isaïe : « le peuple qui marchait », alors que l’évangile nous dit, se référant au même prophète Isaïe, : « le peuple qui habitait » ! Marcher et habiter ? Ce n’est pas la même chose !

Et si on suit J M LUSTIGER, nous avons la traduction du même passage qui dit : « le peuple qui était assis » ! Que choisir ?

Où il n’y a pas d’ambiguïté, c’est bien que le peuple était dans les ténèbres, et là, c’est l’histoire de tous les peuples, l’histoire de toute l’humanité qui se présente à nous : c’est l’histoire du peuple hébreux esclave en Egypte ou dans le désert lorsqu’il récrimine ; c’est ces peuples des Galilée des nations de l’Evangile comme ceux de l’ancien testament ; c’est la communauté de Corinthe ou la notre lorsque nous nous divisons, tous ces maux qui rongent notre société et notre monde contemporain. Et il est superflu de faire la liste des abominations qui nous affligent dans notre vie, même si ce n’est pas directement dans nos réalités quotidiennes mais réellement dans notre cœur : il suffit de faire retour sur nous même.

Et comme de tous temps, les hommes face aux mondes ténébreux réagissent pareillement : ceux qui habitent ces situations, qui ceux résignent (il faut bien vivre ! Les oignons, c’est quand même bon !), ceux qui restent assis à râler (le café du commerce), et ceux qui avancent sans bien savoir où ils vont tout en prétendant conduire les autres, et là, les politiques de tous poils font florès.

Sans doute Pierre, André, Jacques et Jean font partie des résignés qui, pour une part, s’accommodent de leurs conditions de vie (« c’étaient des pécheurs »). Mais cet accommodement n’est qu’apparent : en fait une Espérance formidable habite leur cœur. Et lorsque « une grande lumière » se lève sur leur vie, eux-mêmes se lèvent, se désinstallent de leurs habitudes de vie, ils quittent leurs barques pour suivre cette lumière en la personne de Jésus, comme les Hébreux l’avaient fait en suivant Moïse, les mages en suivant l’étoile.

Mais faisons attention au texte de cet Evangile. Nous aurions peut-être spontanément tendance à penser d’emblée à ces hommes en tant qu’ils sont devenus apôtres.

La traduction œcuménique donne comme titre à ce passage « Jésus se retire en Galilée », l’appel des apôtres se fera six chapitres plus loin. En fait Pierre, André, Jacques et Jean sont comme chacun de nous qui voyons la réputation de Jésus présentée dans les premiers versets du texte et qui répondent à son appel pour voir « où il demeure ». Et s’ils le suivent ce n’est pas pour le servir mais pour écouter sa parole (les derniers versets de cet évangile) et comprendre la promesse dont Jésus est porteur, et qu’ils ne comprendront que le jour de la Pentecôte, jour où ils deviendront « serviteur » ; et que comme nous, les corinthiens n’en finissent pas de découvrir dans la douleur, celle de l’enfantement des enfants de Dieu.

Amen

Dominique