Dans le premier texte biblique (Exode 20,1-17) qui nous est proposé aujourd’hui, nous voyons Moïse donner à son peuple une Loi (les 10 commandements) pour pouvoir vivre ensemble en essayant de se respecter mutuellement. Et dans le texte d’Evangile (Jean 2,13-25), nous entendons Jésus dire : « Ne faites pas de la Maison de mon Père, une maison de trafic. » Or la maison du Père, en ces temps plus difficiles d’aujourd’hui, c’est l’humanité toute entière. Nous imaginons très bien, en plein cœur de Jérusalem, la présence imposante du Temple construit par Salomon pour rendre un culte au Dieu qui avait libéré Israël. Le Temple, c’était le lieu de prières et de sacrifices offerts (depuis Abraham, on offrait à Dieu des animaux …) C’est dans le Temple qu’on se liait à Dieu… mais ce Temple était devenu un lieu de marchandages, où le pauvre qui ne pouvait qu’acheter des petites colombes était écrasé par le riche qui, lui, pouvait se payer une brebis ou un bœuf pour offrir en sacrifice à son Dieu.
Le Temple, symbole de la relation des Hommes à Dieu : mais, au temps de Jésus, on avait reproduit devant Dieu le système des classes sociales, car tout le monde n’offrait pas de sacrifice d’égale valeur… Jésus intervient et symboliquement, il renverse tout : « Ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic ». Or, encore aujourd’hui, combien de parades nous sommes nous construites pour nous donner une apparence de croyants, ou de chrétiens ? Combien de justifications nous sommes nous données pour éviter de trop nous engager là où nous vivons ? Combien d’actions au nom de Dieu lui-même pour, en fait, ne rechercher que notre propre intérêt ? Combien d’infidélités camouflées à l’égard de Dieu ? Combien de complicités silencieuses avec des trahisons de toutes sortes pour sauvegarder nos propres intérêts ? Notre relation à Dieu, à Jésus-Christ, comme notre relation aux autres, n’est-elle pas, en fait, le lieu de tout un marchandage de notre part, qui nous évite de nous engager vraiment ?
Le Temple est un véritable lieu sacré que Jésus veut faire respecter ; mais ce qui est infiniment plus grand et plus beau encore qu’un bâtiment de pierre, c’est la vie d’un être humain, véritable Temple de Dieu. Nous le chantons parfois : « Tout Homme est une histoire sacrée, tout homme est à l’image de Dieu ». Oui, le véritable Temple de Dieu, c’est la Personne Humaine, ne l’oublions jamais ! Ne faisons pas du corps de l’autre, de la vie de l’autre, de notre relation à l’autre un lieu de marchandage, de trafic ! Faisons toujours passer la vie d’une personne avant toute loi, même religieuse…comme l’a fait Jésus. Dieu regarde toujours le cœur de l’homme avec beaucoup de respect, quelque soit le chemin qu’il ait pu prendre au sein de nos sociétés ou de nos religions…Souvenons-nous de l’attitude de Jésus devant la femme adultère : en silence, il s’est mis à écrire sur le sol…et ensuite, il a dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas…ne pèche plus ! ». Oui, Dieu nous regarde toujours avec beaucoup de respect, même embourbés dans nos péchés… il intervient seulement pour nous relever et nous appeler à la vie.
Il est vrai que Jésus intervient un peu brutalement dans le Temple et qu’il pourrait intervenir sans doute aussi brutalement dans notre vie à chacun et chacune de nous : nous le verrions prendre un fouet et renverser tout ce qui, en nous, abîme l’Homme et ternit tout ce qui nous empêche d’aller jusqu’au bout de nos engagements à la suite du Christ. Mais ayons le courage de le laisser agir là où nous n’avons même plus la force de bouger. Oui, Seigneur, aide-nous à bannir de nos vies tout ce qui est marchandage, complicités devant le non respect de la dignité humaine ! « Toute personne est une histoire sacrée, toute personne est à l’image de Dieu, le Temple de Dieu ». « Fratelli Tutti… » : Tous frères et sœurs !
Tous, nous habitons la même maison, la Terre. Apprends-nous, Seigneur, à nous aimer comme des frères et sœurs sur notre planète Terre, sans aucun marchandage entre nous, à nous respecter les uns les autres ! à nous aimer les uns les autres, comme tu nous l’a demandé.
Louis Morandeau