Homélie du dimanche 19 mars 2023, 4ème de carême, abbé THEBAUT

savoir la Beauté

Nous connaissons tous sans doute l’iconographie des 3 singes, illustration du dicton du penseur chinois Confucius : « je ne vois pas le mal, je n’entends pas le mal, je ne dis pas le mal ».
Heureux alors l’aveugle né surtout s’il est aussi sourd et muet : il serait alors naturellement protégé de tout mal et conserverait toute son innocence.
C’est cependant le contraire qui se passe en fait selon l’Evangile d’aujourd’hui. La cécité est vécue non seulement comme un malheur mais encore comme une malédiction.  
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« je ne vois pas le mal, je n’entends pas le mal, je ne dis pas le mal ».
Ce principe philosophique confucéen a priori excellent en théorie pèche malheureusement dans sa mise en œuvre pratique car dans la réalité le bien et le mal sont intimement mêlés et emmêlés.
Il n’y a pas le bien pur d’un côté – si ce n’est en Dieu- et le mal absolu d’un autre.
Ainsi, et par conséquence, ne plus voir, entendre ou dire le mal entraînerait aussi ne plus voir, entendre et dire le bien.
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Les 3 singes se cachent les yeux, les oreilles et la bouche sans pouvoir rien trier !
Leur innocence n’est qu’ignorance.
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« je ne vois pas le mal, je n’entends pas le mal, je ne dis pas le mal ».
L’ignorance du mal équivaut à l’ignorance du bien, à l’ignorance du bien et du mal.
On est ici dans une chimère édénique de la création d’avant le péché des origines et la consommation peccamineuse du fruit de l’arbre de la connaissance du bien du mal.  

Quand on demande à Jésus  
« Rabbi, qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle ? »
    Jésus répondit :
« Ni lui, ni ses parents n’ont péché.

Comprenons que bien que tous soient pécheurs, aucun d’eux n’a commis de péché en lien de cause à effet avec la cécité.  

Or la cécité est un en elle-même un mal, comme tout handicap ou toute souffrance, et c’est pourquoi Jésus va guérir l’aveugle né. C’est un mal sans péché, sans sens ni raison.  
pour que les œuvres de Dieu se manifestent en lui.
Les drames qui nous frappent aveuglément doivent être pour nous une occasion de faire œuvre de notre capacité à discerner le bien du mal, le mal naturel du mal moral et le bien du bon.  
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Le fruit a été mangé et la connaissance du bien et du mal fait désormais partie de ce que nous sommes comme humains. Nous ne sommes plus des singes ignorants.
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Nous sommes des humains, créés à l’image de Dieu et appelés à la pleine ressemblance avec Lui. Cette transformation isomorphique avec Dieu passe par les trois fondamentaux de notre croissance intérieure que seraient Le Vrai, le Bien, et le Beau.  

Il s’agit d’avoir des idées justes : le Vrai ;
de les incarner dans notre manière de vivre : le Bien ;
et pour éviter que cela reste un système de pensée et une règle morale il faut ajouter le Beau, l’expérience intérieure spirituelle qui nous fait goûter la joie d’admirer le vrai et d’accomplir le bien.  

C’est d’ailleurs peut-être là la clef de lecture de l’élection du futur roi David
le garçon était roux, il avait de beaux yeux, il était beau.