Homélie du dimanche 12 mars 2023, 3ème de Carême A, abbé THEBAUT :

 vrai homme et vrai Dieu

On me demande parfois comment on doit s’adresser à moi, à un prêtre et quel titre utiliser : Je réponds généralement que le titre  officiel est « abbé/Monsieur l’abbé » mais que beaucoup utilise le synonyme « père » ou « mon père ».
De fait seuls les distraits  confus quand ils s’en rendent compte et les laïcards anticléricaux m’appellent simplement « Monsieur ». Ce qui ne me gêne pas outre mesure car cela reste évidemment vrai.    

Ceci dit comment s’adressait-on à Jésus ?
Dans le péricope évangélique d’aujourd’hui, la Samaritaine, une non-juive, l’appelle « Seigneur » tandis que ses disciples l’appellent « Rabbi ».
Quant à Paul, dans sa lettre aux Romains, il en parle comme de « notre Seigneur Jésus Christ » ou simplement « le Christ ».  
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La Samaritaine.
La femme lui dit : « Seigneur, kyrie, donne-moi de cette eau,  
Kyrie n’est rien de plus à l’époque et dans la bouche de la Samaritaine que l’équivalent moderne du mot Monsieur.

La Samaritaine ne fait ici aucune profession de foi particulière à l’égard de Jésus, elle se contente d’être polie avec lui.  
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Remarquons qu’il n’y a pas d’équivalent féminin en grec biblique au titre de Monsieur/ kyrie.
Jésus ne peut donc que l’appeler du générique « femme » gunai
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Les disciples de Jésus.
Ils ne s’adressent évidemment pas à Lui en l’appelant  « monsieur »/ kyrie.
Ils le respectent aussi probablement trop pour l’appeler simplement par son prénom.  
Ils lui confèrent donc le titre qui correspond à leur relation de maître à disciples et l’appellent rabbi/ ce qu’on pourrait traduire par « maître/ professeur  ».  

Les disciples ne professent rien quant à la nature divine de Jésus en l’appelant rabbi. Ils se contentent de le reconnaître comme un guide dans le judaïsme.  
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On pourrait éventuellement faire un parallèle avec le titre de Monsieur ou Madame le pasteur dans le protestantisme, simple formule de reconnaissance de compétence en religion.  
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La résurrection a manifesté Jésus comme Dieu fait homme.
D’où la profession de foi de St Thomas à Pâques
Jn 20.28 “Mon Seigneur et mon Dieu !” 
Puis celle de St Pierre à Pentecôte Ac 2.26 Dieu l’a fait Seigneur et Christ, ce Jésus que vous, vous avez crucifié.”  

Jésus est reconnu comme divin en son humanité. Il est rétabli dans sa condition divine en conservant notre humanité. Kyrie/monsieur devient en Jésus un élément de la divinité, un titre divin.  

Paul, qui n’a pas connu l’homme Jésus de son vivant mais seulement l’homme Jésus ressuscité et rétabli dans la gloire de sa divinité,  le désignera généralement dans ses lettres comme Christ/ Christ Jésus ou Jésus Christ ou encore avec le mot kyrie mais avec un article ou un pronom pour en faire un titre pascal et divin.  
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Certains dans notre Eglise sont appelés   « Monseigneur », en particulier les évêques.
Plus qu’un titre, ce doit être pour eux un rappel à l’ordre, celui de vivre à l’image du seul Seigneur, notre Seigneur Jésus Christ.  
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Le mot kyrie, à l’origine simple  équivalent du mot Monsieur, a pris avec la résurrection du Christ une signification divine.
A tel point qu’appliqué à Jésus, il est désormais traduit en français par « Seigneur » dans les Evangiles même avant sa mort et sa résurrection.  

Une telle traduction a l’avantage de mettre en relief la divinité permanente de Jésus.
A l’inverse la perte du kyrie/ Monsieur après la résurrection tend à nous faire oublier la permanence de l’humanité de Jésus ressuscité dans le rétablissement de sa condition divine.    

En Jésus, Dieu s’est fait humain et il l’est à jamais !