“IL VIT ET IL CRUT”

« Il vit et il crut » 1 Jn 20,8
C’est par cette simple phrase que l’apôtre Saint Jean rend compte de la certitude qui fût la sienne de la Résurrection du Christ lorsqu’au matin de Pâques il entra, à la suite de Pierre dans le tombeau vide où avait reposé le corps de Jésus.


Le contexte de la scène et la chronologie des évènements sont très instructifs. On est au matin du « premier jour de la semaine », c’est-à-dire le dimanche matin. Il fait encore sombre – « c’est encore les ténèbres » – et cependant, poussée par un élan violent de son cœur Marie-Madeleine se rend au tombeau. Elle ne peut imaginer ce qui va se passer. Elle ne voit rien, le tombeau est vide où avait reposé celui qu’elle n’avait cessé de chercher. Elle va trouver Simon-Pierre. Elle lui fait part de sa surprise.

Celui-ci, sans attendre, se met à courir pour se rendre au tombeau. Il est accompagné de Saint Jean qui arrivera le premier mais laissera à Pierre le soin d’entrer d’abord.
C’est Pierre qui constatera le vide du tombeau. Le corps mort de Jésus n’est plus là où on l’avait déposé. Seuls les linges qui avaient entouré ce corps sont là, rassemblés dans un coin.

C’est alors que Jean va entrer. Comme Pierre il aurait pu sombrer dans un abîme de perplexité, se demander ce qu’il était advenu du cadavre de ce Jésus qu’il avait suivi jusqu’au pied de la croix et à l’ensevelissement duquel il avait assisté. Il n’y aura rien de tout cela. Observons la différence d’attitude entre ces trois personnages : Madeleine hésite entre le chagrin et la colère, Pierre est perplexe et cherche peut-être à comprendre ce qui s’est passé.

Rien de tout cela pour Jean : « il vit et il crut ».


Cette petite phrase est extraordinaire. En effet, que voit donc Jean ? Rien en réalité, ou du moins rien de ce que l’on se serait attendu qu’il trouvât. Rien que l’absence, que le vide du tombeau.
Rien que ces quelques linges mis de côté. C’est de cette absence même que va jaillir sa foi.


L’attitude de Jean est très éclairante pour nous qui n’avons rien vu non plus avec nos yeux humains. Notre regard est impuissant par lui-même à saisir la présence vivante du ressuscité à travers les ombres et les obscurités de nos vies. Et pourtant nous savons qu’il est vivant celui en qui nous avons mis notre espérance.
Jean a vu et il a cru. Son regard est éclairé par la lumière de la foi. Si nous y réfléchissons bien n’est-ce pas cette lumière qui nous fait tellement défaut ? Si nous nous contentons de regarder la réalité quotidienne avec notre simple regard humain nous serons très vite déçus ou même découragés tant elle est parfois sombre cette réalité. L’actualité est inquiétante, nous avons du mal à y trouver des signes d’espérance.
C’est un regard de foi qu’il nous faut porter sur ce monde. Si la résurrection du Christ est la cause de notre joie, elle est aussi la lumière qui vient éclairer notre regard. Maître de l’histoire et de toute chose, Dieu nous invite à regarder au-delà des apparences la réalité concrète de nos vies. De la foi naîtront l’espérance et la charité qui peuvent redonner du sens à nos vies.
Telle est la grâce que nous pouvons demander en ce temps pascal qui commence : celle de la lumière que donne la foi. Nous allons chanter l’Alléluia pascal, la joie de la résurrection. Que cette profession de foi ne soit pas seulement annoncée par nos voix. Qu’elle irrigue au contraire tout notre être dans l’espérance de la joie éternelle dont la fête de Pâques est la préfiguration.
Père Bernard de Lisle