Ordination diaconale de Frère Foucauld et frère Norbert à l’abbaye de Juaye Mondaye (homélie de Mgr Colomb, 30 décembre 2020)

30 Déc 2020

Actes 8,26-40    Psaume 95     Luc 10,1-9 *

Très Révérend Père, chers frères Foucault et Norbert,

Bien chers pères et frères,

frères et soeurs dans le christ,

Vous attendiez sans aucun doute ce moment depuis fort longtemps et vous y êtes après plusieurs reports dus à la pandémie et aux périodes de confinement imposées. Pourtant, tous les deux, depuis longtemps, vous êtes proches de l’abbaye et de la grande famille augustinienne des Prémontrés.

Frère Foucauld, à quelques kilomètres près, vous auriez pu voir le jour dans cette belle abbaye, vous avez eu un frère comme aumônier de votre troupe scoute.

 Frère Norbert, Fécamp est un peu plus loin, mais c’est encore la Normandie et à l’âge de 18 ans, vous avez rencontré cette communauté.

Moine ou prêtre diocésain ? Tous les deux, vous avez été touchés par la beauté de la vocation canoniale. Ici à Juaye Mondaye. Vous avez trouvé une réponse à la solitude du prêtre diocésain et au manque d’apostolat de la vie monastique. Vous avez effectué diverses expériences, fait des pas en avant, patienté pendant plusieurs années. Vous avez vérifié le caractère sérieux du discernement dans cette congrégation, la liberté qui vous a été donnée d’aller voir ailleurs, à l’école de charité mission pour Frère Foucauld, à l’université de Lille puis à celle de Paris pour Frère Norbert.

Aujourd’hui, c’est avec une joie toute particulière que nous sommes rassemblés par vous, chers amis, après la décision du Père Abbé.

Chers frères et sœurs, nos amis ont entendu l’appel du Seigneur à le suivre, ils ont cheminé pendant plusieurs années à sa suite, s’employant à discerner sa volonté, et maintenant il vont franchir une nouvelle étape sur la route du sacerdoce. Ils vont être ordonnés diacres, c’est-à-dire qu’à l’image de notre Seigneur qui n’est pas venu pour être servi mais pour servir (Mt 20,28)  ils vont se faire serviteurs. Leur disponibilité au service de Dieu et de son Église, sera rendue visible par leur engagement au célibat pour le Royaume. Ils se donneront tout entier, corps et âme, pour suivre le Christ et travailler à le faire connaître et à annoncer la bonne nouvelle de l’évangile. Ils vont s’engager aussi, par la prière des heures à la louange pour leurs frères, qu’ils serviront en ayant un souci particulier des plus pauvres.  A ceux-là ils montreront le visage de miséricorde du Père, ce visage qui nous est révélé aujourd’hui par la liturgie.

Chers frères Foucauld et Norbert, une fois encore, en ce jour où les lumières de la nouvelle année s’annoncent, le Seigneur vous demande de vous avancer, de faire un pas,  pour embrasser le ministère du service, une charge bien peu mondaine il faut le dire, mais si exigeante, car vous allez devenir porteurs de la lumière véritable, serviteurs de la vérité. Au moment de devenir diacre, la liturgie nous offre de méditer ces deux textes qui nous parlent de mission (Le livre des Actes des Apôtres et l’évangile selon Saint-Luc).

Servir la Vérité ne vous donnera pas la fièvre des grandeurs, croyez le, ce service vous invite, comme le fut Philippe par l’ange du Seigneur, à emprunter une route déserte, celle de notre monde, celle qui descend. Il faudra prendre une posture d’abaissement pour rejoindre celles et ceux qui attendront de vous, consciemment ou non, une parole claire et un enseignement véritable selon la révélation que nous fêtons en cette période où Dieu se dévoile dans sa charité de libérateur qui vient nous sauver.

Philippe avait apporté la preuve qu’il était un grand serviteur de l’évangile en Samarie. Aussi quel dut être son étonnement en recevant l’ordre de quitter son territoire de mission pour se rendre sur un chemin désert ! Étrange endroit vraiment pour y annoncer l’évangile ! Il obéit cependant sans discuter. Et voici que passe le char d’un haut fonctionnaire de Candace, reine d’Ethiopie, qui a fait un long voyage pour adorer à Jérusalem.

Mais comment aurait-il trouvé Dieu dans cette ville d’où Jésus avait été rejeté ? Cet homme rapporte pourtant un trésor, infiniment plus grand que les cadeaux de sa souveraine (v. 27) : une portion des saintes Écritures. Et Dieu l’a conduit dans sa lecture jusqu’au cœur du livre d’Isaïe, le ch. 53 es 53.1-12. Ainsi tout a été préparé devant le serviteur du Seigneur. L’Éthiopien apprend par lui à connaître Jésus. Il peut être baptisé et continuer son chemin «tout joyeux» pour devenir, probablement, un messager de la grâce dans son lointain pays.

Ne sont pas évangélisateurs seulement ceux qui s’adressent à des foules. Commençons par être obéissants, en particulier dans nos déplacements et les changements de mission qui nous sont demandés . Le Seigneur permettra alors que nous nous trouvions aussi, juste au bon moment, sur le chemin de quelqu’un auquel nous aurons l’occasion de présenter le Christ.

Enseigner c’est imiter Philippe qui monte dans le char pour prendre le temps d’expliquer, d’éclairer et d’orienter, puis qui continue sa route jusqu’à Césarée en annonçant l’évangile dans toutes les villes sur son passage.

Votre ministère diaconal, chers amis, est le ministère de l’étoile, l’étoile qui dirige les peuples à la connaissance du Seigneur. Le pape Paul VI en 1974, s’adressant au conseil pour les laïcs disait ceci : “Notre monde n’à pas besoin de maîtres mais de témoins”. Soyez ces témoins en exerçant le ministère de la parole, mais aussi en assurant le service des pauvres et celui de l’autel. Depuis un certain nombre d’années, hélas, une confusion s’est installée pernicieusement en séparant témoignage et enseignement doctrinal. Ceci est inacceptable, le maître n’est pas un témoin, mais le témoin est toujours à la fois maître et saint.

Votre diaconat ne doit pas devenir une case à cocher sur votre route vers le sacerdoce, vous êtes invités pour aujourd’hui, par le Seigneur à devenir, en vivant cette belle charge, les « Philippe » sur la route des hommes, en témoignant de toute votre force de la charité de Dieu pour tout homme, une charité à pratiquer pour inviter les hommes à entrer dans la louange et l’adoration pour leur Seigneur, ce qui est aussi, et il faut le souligner, le désir de Dieu. Votre prière quotidienne en sera l’expression publique dans ce lieu magnifique et ailleurs.

Le ministère diaconal vous mènera comme Philippe dans les villes d’Ashdod de notre temps. C’est dans cette ville d’Ashdod que le premier livre de Samuel, au chapitre cinquième, nous apprend que les Philistins, après s’être emparés de l’Arche de l’Alliance, la placèrent dans le temple de Dagon, divinité païenne qui était adorée par les Amorrites et les Philistins. Offense suprême, me direz vous, et pourtant si actuelle. Aujourd’hui, là où vous vivrez votre ministère vous constaterez qu’entre nos rêves et la réalité pastorale, il peut y avoir un monde et c’est ce monde, cette périphérie qu’il faut visiter ! De nombreuses personnes, y compris parmi nos frères et sœurs catholiques placent notre Seigneur en cohabitation avec les divinités modernes, hédonisme, matérialisme, occultisme, syncrétisme, idolâtrie de soi-même, spiritualités diverses supposées apporter le bien-être et l’évasion. Le christianisme étant alors réduit à un ensemble de valeurs sur le marché des valeurs de la République et d’autres qui changent au gré des lois et des règlements, des gouvernants et des majorités qui les soutiennent… Il vous appartiendra de dénoncer cela pour aider les évêques et les prêtres à faire progresser le peuple qui appartient au Dieu vivant et Vrai. Ainsi comme le recommande le Seigneur, il nous appartient à tous, baptisés, religieux et clercs ordonnés d’annoncer le règne de Dieu là où notre devoir d’état nous porte. L’urgence de la mission nécessite la pauvreté mise en relief dans ce passage de saint Luc. Dans la vie religieuse, vous trouverez les bonnes conditions pour embrasser votre diaconat dans un esprit de liberté vis à vis du monde et de ses flâteries, afin de témoigner de la Vérité, de servir le Seigneur et d’éduquer le Peuple de Dieu à l’aimer sans partage dans un esprit d’obéissance à l’Eglise. Etre envoyés deux par deux c’est aussi le rappel que nul n’est plus grand que le Maître. Aucun d’entre nous n’est la Vérité. Le compagnonnage dans la mission est le rappel que deux pauvretés font toujours une richesse au service de celui qui est la sagesse de Dieu.

Bien chers frères à qui je vais, dans quelques instants, imposer les mains, je vous invite au nom du Seigneur et de l’Eglise, sous l’oeil attentif de votre supérieur légitime, alors que par les conseils évangéliques vous vous êtes mis en marge du monde et de ses préoccupations, à vivre ce temps de diaconat, par amour du Seigneur, comme une mise en marche vers les pauvres de Dieu, ceux qui ne comprennent pas, ceux qui n’arrivent plus à comprendre, ceux qui ne connaissent pas le Christ, ceux qui sont abandonnés aux divinités qui, manipulées par l’esprit du mal, détournent l’homme du vrai bonheur. Vous voici arrivés au diaconat pour annoncer le règne de Dieu et le faire connaître à tout être. C’est en cela que vous êtes constitués par l’ordination, comme serviteurs de la charité, celle du Christ qui nous presse. Avec Lui faites route, il est votre compagnon véritable car c’est lui le Chemin sur lequel beaucoup de chars s’avancent avec ignorance. En communauté fraternelle, soutenez vous et priez les uns pour les autres. Etre envoyés à plusieurs sera aussi, pour vous tous, le rappel que c’est ensemble que nous portons la mission de l’Eglise et qu’elle a pour fin l’amour de Dieu et le salut des âmes. Nous devons devenir des témoins de la vérité et des maîtres en sainteté. C’est aujourd’hui, le critère premier et incontournable pour que notre annonce soit crédible.

Puisse le Seigneur, vous guider, vous éclairer et vous affermir dans l’abandon de votre être pour rapprocher du Christ ceux qui s’en sont éloignés et ceux que le char de Philippe n’a pas croisés. Alors dans l’exercice du service de la charité et de la vérité vous deviendrez la manifestation vivante du psaume 95 que nous venons de chanter, car y est présent tout votre ministère: “racontez à tous les peuples sa gloire, à toutes les nations ses merveilles ! Il est grand, le Seigneur, hautement loué, redoutable au-dessus de tous les dieux; néant, tous les dieux des nations ! Lui, le Seigneur, a fait les cieux : devant lui, splendeur et majesté, dans son sanctuaire, puissance et beauté”.

Entrons dans la prière d’ordination avec gravité et action de grâce, Le Christ vous envoie sur les chemins des hommes pour aimer dans l’abaissement et enseigner dans l’élévation des intelligences afin de témoigner en le manifestant par toute votre vie. Amen

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