Dans le cadre de l’Année Sainte, les diacres permanents du monde entier étaient invités à participer au Jubilé des diacres, le dimanche 23 février. Trois diacres de notre diocèses étaient présents à Rome avec leurs épouses à cette occasion.
Du 20 au 24 février, 545 diacres et épouses de diacres se sont retrouvés à Rome pour le pèlerinage du Jubilé de l’Espérance des diacres. Nous étions trois couples du diocèse de La Rochelle et Saintes : André et Josette Degorces, Arnaud et Béatrice Foüan, Dominique et Catherine Vigié.
Dans ces lieux de mémoire des premiers chrétiens de Rome, dont St Pierre et St Paul, nous avons été appelés à redire notre foi (anniversaire des 1700 ans du concile de Nicée), à célébrer l’amour de Dieu, à entrer dans une démarche de conversion et à fêter les 60 ans du rétablissement du Diaconat permanent.
Marches, rencontres, fraternité, richesse des échanges, temps de prière, célébration de la réconciliation avant le passage des Portes Saintes, et visites se sont succédé dans la convivialité et la joie d’être ensemble pour célébrer l’Espérance.
Lors de la première journée, une riche intervention de la communauté Sant’Egidio sur l’Eglise aux périphéries nous a notamment rappelé que « si notre prière n’est pas habitée par nos rencontres avec les pauvres, elle risque de devenir une chose esthétique. Nous devons écouter l’Evangile de la même manière que nous écoutons les pauvres ».
La messe d’ouverture qui a suivi a été présidée par le cardinal Jean-Marc Aveline. Pour lui, « le ministère du diacre est un ministère central dans la vie de l’Eglise, car il décentre l’Eglise d’elle-même. Dans la liturgie diocésaine, le diacre est au plus proche de l’évêque pour signifier la prédilection du Seigneur pour ses enfants les plus fragiles. Quand un diacre entre dans l’église, on peut voir sur ses épaules les tourments du monde. Dieu regarde chacun dans la singularité de sa personnalité. C’est aussi là la vocation du diacre. Le diacre doit révéler à chacun le mystère sacré qui est en lui. La mission du diacre est de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu qui sont dispersés. Ne laissez personne sur le bord du chemin pour aider l’évêque dans son travail de communion ». Il a remercié les diacres d’être « grains de sable et grains de sel dans le monde ». Il a également porté attention « aux épouses dont le mari est devenu diacre et non épouses de diacres ».
Le lendemain, Mgr Percerou, évêque de Nantes, nous a dit que la mission du diacre est de veiller à ce que l’Eglise soit belle, ouverte sur le monde et joyeuse. La fréquentation du Christ nous établit Pierres vivantes sur lesquelles se bâtit l’Eglise. « Comment suis-je cette pierre vivante active et agissante dans le monde ? », nous a-t-il demandé. Et de terminer son homélie par : « Donne-nous l’audace, Seigneur, de pouvoir accompagner celles et ceux que nous croisons sur la route pour qu’à leur tour ils puissent proclamer un jour, comme Pierre, « tu es le Messie, le fils du Dieu vivant ».
Le dernier soir, une très belle et dynamique intervention de Sr Nathalie Becquart, sous-secrétaire du synode, nous a invités à réfléchir sur le thème « Une Eglise synodale, une Eglise diaconale, une Eglise de l’écoute ». La synodalité dans l’Eglise c’est « Marcher ensemble à l’écoute de l’Esprit, discerner et prendre des décisions qui font avancer tous ensemble. Chaque vocation spécifique met en lumière une facette de la vocation baptismale (prêtre, prophète et roi). Plus on écoute les périphéries, plus on laisse l’Eglise devenir diaconale. Ainsi une Eglise synodale ne peut être sans la vocation diaconale. C’est une église de relation qui implique l’écoute et la fraternité entre tous. Écouter les cris et les besoins du monde, chercher ensemble comment y répondre, prendre des décisions qui font consensus ; c’est cela une Eglise synodale. Il faut passer d’une culture cléricale à une culture du prendre soin de l’autre avec des lieux de réconciliation et de pardon, et de la convivialité. Écouter et discerner comment l’Esprit-Saint, in fine, va apporter de l’harmonie. Il faut un apprentissage par l’expérience pour promouvoir la synodalité. Voulons-nous faire la volonté de Dieu ? Les diacres par l’entrelacement des vocations du mariage et de l’ordre portent en eux des germes de synodalité.
Lors de la messe d’envoi, Mgr Lacombe, évêque d’Auch et accompagnateur du Comité National du Diaconat, a également repris cet aspect. Pour lui, le sacrement de mariage permet de faire grandir le sens du service diaconal. Diacres, épouses et proches de diacres sont des catalyseurs pour une Eglise de service. « Que cet entrelac de ministères, de vocations nous stimule pour que nous soyons des témoins de ce pèlerinage de l’Espérance »
A l’issue de ce pèlerinage, il nous a invités à descendre de la montagne pour retrouver ceux qui nous sont confiés et nous a interpellés pour que nous participions à l’appel de nouveaux diacres.
AMEN !
Catherine et Dominique Vigié
Homélie préparée par le pape François pour le Jubilé des diacres
Le message des Lectures que nous avons écoutées pourrait se résumer en un mot : gratuité. Un terme qui vous est certainement cher, à vous diacres, réunis ici pour la célébration du Jubilé. Réfléchissons donc à cette dimension fondamentale de la vie chrétienne et de votre ministère, en particulier sous trois aspects : le pardon, le service désintéressé et la communion.
Le pardon
Premièrement : le pardon. La proclamation du pardon est une tâche essentielle du diacre. En effet, c’est un élément indispensable pour tout cheminement ecclésial et une condition pour toute coexistence humaine. Jésus nous en montre la nécessité et la portée lorsqu’il dit : « Aimez vos ennemis » (Lc 6, 27). Et c’est exactement ainsi : pour grandir ensemble, en partageant les lumières et les ombres, les succès et les échecs des uns et des autres, il est nécessaire de savoir pardonner et demander pardon, en rétablissant les relations et en n’excluant pas de notre amour même ceux qui nous frappent et nous trahissent. Un monde où il n’y a que de la haine pour les adversaires est un monde sans espérance, sans avenir, destiné à être déchiré par des guerres, des divisions et des vengeances sans fin, comme nous le voyons malheureusement encore aujourd’hui, à tant de niveaux et dans diverses parties du monde. Pardonner signifie donc préparer une maison accueillante et sûre pour l’avenir en nous et dans nos communautés. Et le diacre, personnellement investi d’un ministère qui le conduit aux périphéries du monde, s’engage à voir – et à enseigner aux autres à voir – en tous, même en ceux qui se trompent et font souffrir, une sœur et un frère blessés dans l’âme, et donc ayant plus besoin que quiconque de réconciliation, d’accompagnement et d’aide.
La première Lecture nous parle de cette ouverture du cœur, en nous présentant l’amour loyal et généreux de David pour Saül, son roi, mais aussi son persécuteur (cf. 1 S 26, 2.7-9.12-13.22-23). Dans un autre contexte, la mort exemplaire du diacre Étienne, qui tombe sous les coups de pierres et pardonne à ses lapidateurs, nous en parle aussi (cf. Ac 7, 60). Mais nous la voyons surtout en Jésus, modèle de toute diaconie, qui sur la croix, “se vidant” de lui-même jusqu’à donner sa vie pour nous (cf. Ph 2, 7), prie pour ceux qui le crucifient et ouvre au bon larron les portes du paradis (cf. Lc 23, 34.43).
Le service désintéressé
Et nous arrivons au deuxième point : le service désintéressé. Le Seigneur, dans l’Évangile, le décrit dans une phrase aussi simple que claire : « faites du bien et prêtez sans rien espérer en retour » (Lc 6, 35). Quelques mots qui portent en eux le bon parfum de l’amitié. Tout d’abord celle de Dieu pour nous, mais aussi la nôtre. Pour le diacre, cette attitude n’est pas un aspect accessoire de son agir, mais une dimension substantielle de son être. Il se consacre en effet à être, dans son ministère, “sculpteur” et “peintre” du visage miséricordieux du Père, témoin du mystère de Dieu-Trinité.
Dans de nombreux passages de l’Évangile, Jésus parle de lui sous cet angle. Il le fait avec Philippe, au Cénacle, peu après avoir lavé les pieds des Douze, en disant : « Celui qui m’a vu a vu le Père » (Jn 14, 9). De même, lorsqu’il institue l’Eucharistie, il affirme : « je suis au milieu de vous comme celui qui sert » (Lc 22, 27). Mais déjà auparavant, sur la route de Jérusalem, alors que ses disciples discutaient entre eux pour savoir qui était le plus grand, il leur avait expliqué que « le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude » (Mc 10, 45).
Frères diacres, le travail gratuit que vous accomplissez, expression de votre consécration à la charité du Christ, est pour vous la première annonce de la Parole, source de confiance et de joie pour ceux qui vous rencontrent. Accompagnez-le le plus possible avec le sourire, sans vous plaindre ni chercher la reconnaissance, en vous soutenant mutuellement, même dans vos relations avec les évêques et les prêtres, « comme expression d’une Église engagée à grandir dans le service du Royaume avec la valorisation de tous les degrés du ministère ordonné » (C.E.I., I Diaconi permanenti nella Chiesa in Italia. Orientamenti e norme, 1993, p. 55). Votre action concertée et généreuse sera ainsi un pont qui reliera l’Autel à la rue, l’Eucharistie à la vie quotidienne des gens. La charité sera votre plus belle liturgie et la liturgie votre plus humble service.
La gratuité comme source de communion
Et nous arrivons au dernier point : la gratuité comme source de communion. Donner sans rien demander en retour unit, crée des liens, parce que cela exprime et nourrit une communauté qui n’a d’autre fin que le don de soi et le bien des personnes. Saint Laurent, votre patron, à qui ses accusateurs demandaient de leur remettre les trésors de l’Église, leur montra les pauvres et leur dit : « Voilà nos trésors ! » C’est ainsi que l’on construit la communion : en disant à son frère et à sa sœur, avec des paroles, mais surtout avec des actes, personnellement et en tant que communauté : “tu es important pour nous”, “nous t’aimons”, “nous voulons que tu fasses partie de notre cheminement et de notre vie”. C’est ce que vous faites : des maris, des pères et des grands-parents prêts, dans le service, à agrandir vos familles pour ceux qui sont dans le besoin, là où vous vivez.
Ainsi, votre mission qui vous prend de la société pour vous y réinsérer et en faire un lieu toujours plus accueillant et ouvert à tous est une des plus belles expressions d’une Église synodale et “en sortie”.
Bientôt, certains d’entre vous, en recevant le sacrement de l’Ordre, “descendront” les marches du ministère. C’est à dessein que je dis et souligne qu’“ils descendront”, et non qu’“ils monteront”, parce qu’avec l’Ordination, on ne monte pas, mais on descend, on se fait petit, on s’abaisse, on se dépouille. Pour reprendre les mots de saint Paul, on abandonne, dans le service, “l’homme de la terre”, et on revêt, dans la charité, “l’homme du ciel” (cf. 1 Co 15, 45-49).
Nous méditons tous sur ce que nous allons faire, tout en nous confiant à la Vierge Marie, servante du Seigneur, et à saint Laurent, votre patron. Qu’ils nous aident à vivre notre ministère avec un cœur humble et plein d’amour, et à être, dans la gratuité, des apôtres de pardon, des serviteurs désintéressés de nos frères et des constructeurs de communion.